Mauritanie : Éditoriale/ Le tout sécuritaire tue la sécurité

mar, 30/03/2021 - 07:30

Alexandre Soljenitsyne est perçu comme l’un des plus puissants critiques du communisme en Union soviétique. Sa citation la plus populaire disait ” Nous savons qu’ils mentent, ils savent aussi qu’ils mentent, ils savent que nous savons qu’ils mentent, nous savons aussi qu’ils savent que nous savons qu’ils mentent et pourtant ils persistent à mentir.”
Dès la première heure de l’annonce de l’information sur le piratage de la Mauritania Airlines, la seule préoccupation des autorités était de brouiller les pistes afin que cet incident, de gros calibre, puisse faire l’objet de plusieurs versions, histoire de masquer la réalité et en faire un simple fait divers.
En réalité nous sommes devant une faille sécuritaire qui demande non seulement le renvoi de ce personnel sécuritaire, tous corps confondus, mais aussi une enquête qui doit déboucher sur des poursuites judiciaires, engagées sans complaisance.
Dans ce cas, les autorités doivent comprendre qu’apres le brouillard, il reste les questions sans réponses. Ce qui permettra de jeter toute la lumière sur cette affaire et situer la vraie responsabilité, à savoir :
– Comment un individu a-t-il pu contourner tout le dispositif sécuritaire d’un aéroport dit ” international ” et atteindre un avion, stationné dans une zone complètement sécurisée?
– Et surtout comment c’est arrivé à l’aéroport Om-Tounsi, considéré, par tout le monde chez nous, comme un aéroport quasi militaire ?
– Comment un aventurier à eu droit d’accès à l’intérieur de cet aéroport dont l’accès est systématiquement refusé, même aux civiles pour des formalités administratives, ou accueillir un voyageur, à plus forte raison, un louche visiteur?
– Les caméras de surveillance étaient-elles neutralisées, ou pas fonctionnelles?
Imaginez donc, cette personne avec un projet terroriste , et ce qu’elle aurait pu faire, comme dégâts , et ce que cela pouvait entrainer comme conséquences ?
Maintenant que tout s’est passé, imaginez la mauvaise réputation qui pourrait être collée à notre aéroport aussi bien à l’intérieur du pays qu’à travers le monde.
Imaginez des vrais pirates s’ils avaient pu mettre les moteurs en marche et étaient arrivés à faire décoller l’avion ; avec comme projets de l’exploser sur Nouakchott ou un pays voisin, quelles unités aériennes allaient les pourchasser, et avec quels avions de chasse allions-nous obliger les pirates à retourner l’avion dans son coin à l’aéroport Oum-Tounsi? Des dégâts massifs se seraient produits certainement.
Et puis arriver à communiquer la nationalité du suspect sans avoir une confirmation catégorique, est un acte qualifié de faute professionnelle impardonnable sur le plan sécuritaire et informatif !
Il existe des règles, en matière pratique à l’information, qui interdisent l’annonce de la nationalité de tout suspect aux médias, avant une confirmation irrévocable ; Ce qui a induit la chaine Aljezeera en erreur monumentale.
Il existe aussi des règles de qualification de notation , effectuées par les autorités de sécurité et approuvées par les compagnies aériennes et les voyageurs. Cet incident, il faut le souligner, avec cette audace, reflétera un cahot administratif et de sécurité épique.
Je n’ai cessé de le dire, malheureusement, les autorités politiques ont adopté , depuis presque plus d’une année ,une approche toute sécuritaire pour le traitement de tout type de dossiers socio-économiques, même ceux à caractère informatif et communicationnel , et à faire usage de mensonge d’État, et de désinformation.
Le gouvernement vit une histoire hanté par ce qui se publie sur les réseaux sociaux, et est allé même jusqu’à pondre une loi répressive, relative aux publications sur les réseaux sociaux et ce, en pleine pandemie Covid-19. A s’attaquer aux blogueurs et journalistes à les terroriser et mettre des lignes rouges à ne pas dépasser. Comme si il suffit que certains hypocrites et australopithèques de l’administration, se mettent à marquer des lignes rouges imaginaires aux Journalistes, bloggeurs, communicateurs pour que ces derniers se plient et deviennent une bague au doigt.
Aujourd’hui, il est claire, et personne ne peut le démentir,que le autorités politiques souffre d’un déficit en Communication . De ce fait tous les journalistes indépendants dignes de ce nom, sont terrifiés et menacés de façon camouflée par l’exclusion et empêches de faire leur travail. Cette politique est mise en exécution via des australopithèques du secteur de la communication en e
manque de stratégie de riposte, au ministère de la culture et au niveau de la HAPA.
Je défie le ministère de la culture, qui est en charge d’organiser le point de presse hebdomadaire , de mettre les ministres devant les vraies questions des journalistes, en laissant le libre accès aux journalistes indépendants et accrédités, comme au temps d’Aziz.
A part ceux amadoués , tous les autres journalistes sont considérés comme des pires ennemis à éviter de près et de loin.
En réalité malgré les années passées dans ce secteur, ces australopithèques n’arrivent pas à évoluer avec les sciences des TIC ; leurs seuls soucis, après bien sur leur recycle au sein de l’administration, est de mettre les bâtons dans les roues des journalistes professionnels et certains correspondants des chaînes internationales , en les réduisant au silence assourdissant par une politique mise en œuvre par le ministère de tutelle et la HAPA.
Ce n’est pas pour rien que les bloggeurs résidents à l’étranger ont plus d’informations, sur ce qui se passe sur les plans sociaux, économiques, et politique, au niveau national et le divulguent sans modération sur les réseaux sociaux au bonheur des citoyens du fait que le journalistes, même s’il détient des informations capitales, en cette ère-ci, il n’ose pas les publier de peur de se voir payer un lourd tribut.
L’une des dernières productions de ces australopithèques est les résultats de la “commission chimio-communautaire” qui avait été chargée de la réforme soi-disant de la presse et dont les résultats ont été adoptés en conseils des ministres , pour venir ainsi, anéantir tous les acquis démocratiques en matière de liberté de la presse, et de liberté d’expression, à savoir un retour à la loi 92 par rapport à la création d’une publication. C’est vraiment une insulte à la profession et à la mémoire de tous ceux et celles qui ont combattu pour que la liberté de la presse soit développée, et préservée.C’est grâce à leurs combats que la presse est ce qu’elle était jusqu’à 2020, date à laquelle tout a presque basculé.
Ainsi si le régime d’Aziz a créé de la zizanie, et rendu malade le secteur, aujourd’hui la presse est en réanimation, en pleine opération chirurgicale.
Vue la situation déplorable, Il faut dire sans froid aux yeux, le journaliste est considéré comme démissionnaire de son principal rôle, que lui dicte le pacte moral, les règles et codes d’éthique et déontologies.
Certains journaux de renommés nationale et régionale, ont été exclus de l’aide de la presse privée , de façon ciblée et arbitraire, sur décision politique, juste parce que les propriétaires sont des personnes qu’on ne peut manipuler, donc bons à mettre à la touche, en attendant de décider de leurs sort .
– les priver de leurs droits corporatifs ,
-Ne pas les convier à des conférences de presse,
– Ne pas leur laisser l’accès au point de presse hebdomadaire,
-Ne pas leur donner des laissez-passer en période de Covid-19 à l’instar de leurs confrères.
-Priver des couvertures médiatiques même si vous êtes un correspondant accrédité.
C’est une vraie guerre contre la profession, où tous les coups sont permis avec tolérance zéro.
Récemment , en lisant un article sur le net, j’ai découvert que le triste destin du docteur Li Wenliang est un exemple plus récent de la tolérance zéro, du gouvernement chinois, envers la critique. Comme vous savez en décembre 2019, avant que le public ne découvre le coronavirus, le jeune médecin a dévoilé ses observations sur une série de mystérieuses contaminations parmi les patients de Wuhan, lors d’une discussion en ligne pour laquelle il a alors été interrogé par la police. Il a, par la suite, contracté le virus et en est mort le 6 février 2020.
Il n’est pas étonnant que les internautes chinois aient adopté une stratégie étrangère pour manifester leur rage et leur frustration, face à la faillite morale du Parti communiste chinois, (PCC) et des hauts fonctionnaires chinois, devant l’épidémie de COVID-19.
Pour la Mauritanie il faut le dire, c’est cette politique boiteuse de ciblage et sans résultats positif, a, d’une part, crée la frustration mais, d’autre part, risque de coûter très cher aux décideurs politiques , car le tout sécuritaire tue la sécurité.
Et nous l’avons vue dans le cas de l’affaire de l’avion.
Je voudrais ici terminer par une citation d’Alexandre encore qui en dit beaucoup sur l’amertume que ressentent aujourd’hui plusieurs journalistes, blogueurs et Communicateurs de tous bords, réduits au silence forcé et relégués au second rang.
Ainsi pour moi, dans un pays où la liberté d’expression, est de plus en plus restreinte, alors le recours à chaque occasion à la dénonciation avec vigueur , via des sujets politiques et sociaux est une question de survie professionnelle et personnelle. Ça devrait être une seconde nature, pour ceux qui osent critiquer, ou être en désaccord avec les politiques et les déclarations du gouvernement, qui ne tiennent pas debout, qu’ils soient journalistes, universitaires, militants, médecins ou citoyens ordinaires.
Alexandre disait que : “Dans ce monde, le plus désespérant est lorsque la vitalité intellectuelle d’une nation est anéantie par la violence. Il ne s’agit plus là seulement d’une violation du “droit d’écrire”, c’est l’étouffement du cœur d’une nation, la destruction de sa mémoire. Dans ce cas, la nation entière n’est plus qu’un corps mort. Alexandre Soljenitsyne”.

Moulaye Najim Moulaye Zeine